Hyacinthe Rigaud, portrait d'un parlementaire, v. 1690-1700 (détail). Coll. priv. © photo d.r. / Stéphan Perreau

Hyacinthe Rigaud, portrait d'un parlementaire, v. 1690-1700 (détail). Coll. priv. © photo d.r. / Stéphan Perreau

En marge des ventes publiques de l’année 2016, nous avons pu croiser la route de quelques productions imputables à Hyacinthe Rigaud ou à son atelier, et qui révèlent à notre sens la richesse du corpus de l’artiste.

Hyacinthe Rigaud, portrait d'un parlementaire, v. 1690-1700. Coll. priv. © photo d.r. / Stéphan Perreau

Hyacinthe Rigaud, portrait d'un parlementaire, v. 1690-1700. Coll. priv. © photo d.r. / Stéphan Perreau

Le premier est un très vibrant buste de parlementaire dont nous pouvons situer aisément la confection aux alentours des années 1690-1700[1]. La perruque en effet, large et léonine, aux deux cheminées sommitales largement écartées très caractéristiques, reste encore peu élevée par rapport à celles présentes dans les effigies de la fin du règne de Louis XIV. Le format, réduit à la plus simple mise en valeur de l’expression, correspond également à ces bustes simples mais efficaces que produit Rigaud dans la dernière décennie du XVIIe siècle, même si l'on ne peut écarter l'hypothèse selon laquelle il pourrait s'agir d'une réduction d'un original plus grand. On reconnaît toutefois dans ce visage toute la verve qu’avait l’artiste à incarner son modèle, notamment grâce au traitement particulièrement vériste des carnations et dans l’intensité du regard.

Hyacinthe Rigaud et Charles Viennot, portrait présumé de jean Phélypeaux de Pontchartrain, v. 1700. Vienne, Graphische Sammlungen Albertina © VGSA

Hyacinthe Rigaud et Charles Viennot, portrait présumé de jean Phélypeaux de Pontchartrain, v. 1700. Vienne, Graphische Sammlungen Albertina © VGSA

S’il reste difficile d’avancer une identité pour cet homme déjà âgé, on le rapprochera dans son attitude, du portrait de François Secousse, conservé au musée des Beaux-arts de Lyon[2], ou dans celui présumé de Jean Phélypeaux, connu par son dessin détenu à l’Albertina de Vienne[3]. Parvenue jusqu’à nous dans un état plutôt satisfaisant, la toile livrera sans nul doute d’autres surprises lors d’une prochaine restauration, notamment dans le traitement minutieux des boucles de la perruque que l’on devine à peine dans leur lecture actuelle.

Atelier d'Hyacinthe Rigaud, portrait de Charles de Saint Albin, v. 1723. Coll. priv. © photo du collectionneur

Atelier d'Hyacinthe Rigaud, portrait de Charles de Saint Albin, v. 1723. Coll. priv. © photo du collectionneur

Dans un tout autre registre, et près de 40 ans plus tard, la main assurée d’un bon copiste issu très probablement du cercle immédiat du maître, peignait un élégant ovale reprenant avec fidélité les traits de l’archevêque de Cambrai, Charles de Saint Albin. L’original, payé 3000 livres en 1723, avait été commandé par le modèle pour marquer son accession au siège de Cambrai et peut s’admirer aujourd’hui au Paul J. Getty museum of Art de Los Angeles.

Hyacinthe Rigaud, portrait de Charles de Saint Albin, 1723. Los Angeles, The Paul J. Getty museum of art © Getty museum

Hyacinthe Rigaud, portrait de Charles de Saint Albin, 1723. Los Angeles, The Paul J. Getty museum of art © Getty museum

Si plusieurs répliques sont connues, dont une au château d’Aulteribe en Auvergne, une autre au musée des beaux-arts de Tournai et une énième au musée de Cambrai, peu de réductions, sinon aucune, n’était jusqu’ici répertoriée. Cet ovale, détenu en mains privées, constitue donc un témoin précieux des adaptations qui furent faites pour diffuser au mieux l’image du jeune prélat, fils illégitime du Régent et de la comédienne Florence Perrin.

Ici, l’aide d’atelier a reproduit à l’identique la tête de l’archevêque, tournée de côté, mais supprimé la main originellement repliée sur la poitrine, accessoire devenu inutile par le cadrage serré de sa version. La physionomie, très fidèlement reproduite en un métier très lissé, témoigne de la parfaite maîtrise de l’artiste de l’image à reproduire.

Suiveur d'Hyacinthe Rigaud, portrait de Charles de La Fosse, v. 1682-1690. Coll. priv. © photo Stéphan Perreau

Suiveur d'Hyacinthe Rigaud, portrait de Charles de La Fosse, v. 1682-1690. Coll. priv. © photo Stéphan Perreau

Comme un pré-écho prémonitoire à la réapparition du dessin fait par Monmorency et Rigaud d’après le second portrait du peintre Charles de La Fosse (vendu avec succès ce mois-ci par la maison Daguerre), nous avions été sollicités l’été dernier pour venir découvrir dans un château périgourdin une réplique de la première effigie du modèle[4]. Réalisé tôt dans la carrière du Catalan, à une époque où le jeune artiste s’apprêtait à travailler sous la houlette de ses grands maîtres à l’Académie, et alors qu’il n’était arrivé que depuis un an dans la capitale, ce portrait fixait déjà une attitude que Rigaud reprendra maintes fois. Comme nous l’avons vu lors de notre article consacré à la redécouverte du portrait de Gaspard Rigaud, la vêture au « col lâché » et au grand manteau ouvert sur le côté, jouira d’un certain succès lorsqu’il s’agira de marquer sinon le statut proprement dit du modèle, du moins sa décontraction.

Suiveur d'Hyacinthe Rigaud, portrait de Charles de La Fosse, v. 1682-1690 (détail). Coll. priv. © photo Stéphan Perreau

Suiveur d'Hyacinthe Rigaud, portrait de Charles de La Fosse, v. 1682-1690 (détail). Coll. priv. © photo Stéphan Perreau

La version conservée en Dordogne, moins « nette » que l’original, n’en est pas moins intéressante. On y retrouve tous les codes couleurs et les moindres détails de l’œuvre peinte en 1682. Le visage, plus enfantin, avec de légers petits défauts anatomiques (notamment dans la bouche un peu de biais) ne gâche pourtant pas la fraicheur de l’ensemble.

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